samedi 29 septembre 2012

Il faut qu'on parle de Kevin de Lionel Shriver

Après avoir lu pendant plus d'un mois des livres dont je n'avais strictement rien à dire (à part Middlemarch, bien sûr), qui s'ils ne m'ont pas transcendée, ont eu le mérite de me distraire et de me faire oublier certaines choses, j'avais envie de revenir à une lecture un peu plus profonde.

D'habitude, je choisis mes livres de manière très aléatoire, à cause de la couverture, d'une tocade subite pour un sujet du à une émission, d'un article lu par hasard, d'une envie de continuer mon défi des livres à avoir lus, bref, selon l'humeur. Cette fois ci c'est un peu différent. J'ai vu pendant quelques temps une amie très chère trimballer dans son sac, à chaque fois que l'on se voyait, un livre. Alors forcément, j'ai eu envie de le lire. Pour en parler avec elle bien sûr, mais aussi parce que je suis une grande curieuse :)

Il faut qu'on parle de Kevin est la relation épistolaire, si l'on peut dire, d'une femme avec son ex-mari. Nous ne lisons que ses lettres à elle. Elles parlent de leur histoire, de leur fils, et d'une tragédie. Kevin, le fils dont il s'agit a perpétré un massacre. Un jeudi qui a changé la vie de toute cette famille, et qui a marquée la narratrice au fer rouge. Alors, elle écrit.

Je n'en dirais pas plus sur l'histoire, de peur de révéler les détails que l'on apprend au fur et à mesure des lettres, jusqu'à l'ultime révélation, glaçante et qui remet beaucoup en cause. Une claque dans la figure, après une lecture qui interroge énormément. Parce qu'Eva, la mère de Kevin, ne verse pas dans le pathos et la lamentation. Implacable, aussi bien avec elle même qu'avec son fils, elle raconte, parle de son rôle de mère, de son absence d'amour pour cet enfant qu'elle a toujours trouvé inquiétant. Dès sa naissance. Que jusque lors elle n'a jamais aimé, malgré ses efforts. Elle parle de son envie de ne pas être mère, du fait qu'elle a cédé à la pression de son mari, et de la société, elle interroge sur la maternité, sur l'instinct maternel, qui semble alors être un mythe éculé. Est-on obligés d'aimer son enfant? Est-ce l'éducation qui transforme un être a priori innocent en un monstre, ou est-ce là, dès le début?
Le sujet douloureux des Mass murderers, (qui ne connaît pas Colombine maintenant?) plus connus que leurs victimes, dont on ne sait pas trop pourquoi ils passent tout à coup à l'acte, et qui effraient, parce qu'on ne comprend pas, est évoqué avec une grande finesse par le prisme de cette mère, qui porte le poids douloureux d'avoir fait naître la source de la mort de plusieurs innocents.
Peut-on se remettre de ce genre de choses? Qui doit-on accuser, s'il y a quelqu'un à accuser...
 C'est un livre dérangeant parfois, par les scènes de confrontation entre Kevin et sa mère, entre un gamin trop intelligent, trop désabusé, qui paraît avoir des siècles d'existence et une mère lucide, mais dépassée, qui se bat contre un mari jouant les autruches.

Beaucoup de questions donc, en refermant cet excellent roman. Pas de réponses, et en aura t-on jamais?


11 commentaires:

  1. Le film était chiant même si j'ai trouvé l'histoire de cette mère en perpétuelle interrogation très intéressante. Je vais peut-être me laisser tenter par le livre qui a l'air de traiter le sujet d'une manière différente.

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    1. Pourtant l'actrice principale est une bonne actrice ! Il faudra que j'essaie de le voir quand même...

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  2. Je passe Eiluned ! Ce livre ne semble pas fait pour moi.

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  3. Le film est très en dessous du livre car il ne pouvait traiter tous les aspects de l'histoire et des questionnements d'Eva. J'ai lu le livre avant et je te rejoins, il est très dérangeant, ça m'a beaucoup interrogé, interpellé... Remué!

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    1. Oui, effectivement, je vois mal comment rendre correctement la subtilité du livre en film, dommage.

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  4. Si vous choisissez vos livres de façon aléatoire, lisez le mien "SANS TÊTE" chez pavillon noir, peutêtre que ?...

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  5. Il a l'air d'aborder la question par différents aspects, ce qui est intéressant; Quant au sentiment maternel comem mythe éculé , c'est Elizabeth Badinter qu'il faut lire : le conflit

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    1. Je note, merci ! Après la lecture de ce livre, il me reste des tas de questions...

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  6. J'adoré ce livre coup de poing (pris en pleine poire lors de la lecture). Rien ne justifie la violence et la monstruosité : certains facteurs familiaux peuvent apporter un élément de réponse, c'est tout. J'ai aimé la forme narrative employée, j'y ai trouvé une très grande intelligence.

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  7. Je suis d'accord avec toi, c'est un roman qui pose énorément de questions. Et qui marque aussi. En revanche, je ne te recommande pas le film, même si Tilda Swinton y est excellente ! J'ai vraiment regretté d'avoir payé ma place de ciné pour aller le voir : c'est plein de symboles lourdingues (la couleur rouge qui apparait tout le temps par exemple) ... et la narration est tellement malmenée que même en ayant lu le livre je n'étais pas toujours sûre de comprendre ! (enfin, ce n'est que mon avis ...)

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